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jeudi 12 janvier 2012

Biographie de Gary Cooper (1/5) : Un cow-boy du Montana

Gary Cooper entouré de sa mère Alice, son frère Arthur et son père Charles

1901-1934 : Un cow-boy du Montana

> Origines
Les ancêtres de Gary Cooper n'étaient pas américains mais britanniques. Au début des années 1890, son oncle, Walter Cooper, émigra aux Etats-Unis, probablement attiré par les récits et histoires qu'il entendait à propos de l'Ouest sauvage, des cow-boys et des indiens. Il s'installa à Last Chance Gulch, qui devint Helena, la capitale du Montana, et travailla pour une compagnie de chemins de fer. Son petit frère, Charles, vint le rejoindre quelques années plus tard, rentra également au service de la compagnie et travailla en parallèle dans une boulangerie, avant d'entamer des études de droit.

En 1894, Charles rencontra Alice Brazier, elle aussi venue récemment d'Angleterre pour commencer une nouvelle vie aux États-Unis, et l'épousa. Leur premier fils, Arthur, naquit l'année suivante, et Frank James le 7 mai 1901.

> Enfance
Arthur et Frank grandirent dans la onzième rue, à Helena, dans une confortable maison à deux étages, passant beaucoup de leur temps libre à battre la campagne. Charles Cooper devint un juriste réputé, et décida d'envoyer ses enfants passer quelques années en Angleterre, avec l'accord de leur mère, pour parfaire leur éducation. Hébergés chez Mr et Mme Barton, ils intégrèrent pour trois ans la Grammar School de Dunstable. Gary Cooper affirma plus tard ne pas avoir de bons souvenirs de cette période où il regrettait le Montana, même si Dorothy Barton, la fille de son logeur en Angleterre, se souvint dans les années 1980 d'un garçon très gai qui ne semblait pas du tout malheureux.

Charles Cooper acheta un ranch à 70 kilomètres de Helena, le domaine Seven Bar Ranch, à Sunnyside, et engagea peu à peu du personnel pour l'entretenir et le développer. Arthur et Frank, à leur retour d'Angleterre, s'y installèrent également pour y travailler. Le jeune Frank abandonna même l'école temporairement en 1917, quand son frère s'engagea pour aller combattre en Europe, et s'occupa du ranch avec sa mère.

Il se prit de passion pour le dessin en voyant les fresques de Charles Russell sur les murs du Capitole de Helena, et s'y consacra sérieusement à son retour au collège. Il en fut pourtant renvoyé pour indiscipline et fut admis à celui de Gallatin, pour terminer la première partie de ses études.
Adolescent, il fut victime d'un accident de voiture, avec un camarade d'école, et resta de longs mois allongés. En convalescence à Sunnyside, il partagea son temps entre le dessin et les chevauchées. Entre temps, le ranch devint très important et Charles Cooper fut nommé à la Cour Suprême.

Les peintures du Capitole à Helena, par Charles Russell

En 1922, Frank s'inscrivit au collège de Grinnel, dans l'Iowa, en section Beaux Arts. C'est là semble-t-il qu'il se confronta pour la première fois au théâtre, par l'intermédiaire du Club Dramatique du collège, auquel il ne fut pourtant jamais admis, sinon à titre honorifique, une fois devenu vedette à Hollywood. Pendant les vacances d'été, pour se changer du ranch et gagner sa vie, il fut conducteur d'autobus pour touristes dans le parc de Yellowstone.
En 1923, parce que c'est parents avaient déménagés sur la côte et par amour d'une jeune fille qui lui demanda d'aller faire fortune à l'Ouest, Frank s'installa à Los Angeles.

> Les débuts comme cascadeur
Il essaya de se faire engager comme dessinateur dans un journal, puis dans une agence de publicité, sans succès, et pour quelques dollars il fit du porte à porte pour un photographe professionnel. Il travailla également quelques temps comme vendeur de rideaux de scènes pour théâtres et cinémas. Pour autant, Frank Cooper n'était pas dans la misère : il vivait chez ses parents et sa mère le couvait à outrance.

En 1924, il retrouva par hasard deux amis d'enfance qui travaillaient dans le cinéma comme cascadeurs : leur job consistait à tomber de cheval pour 10$ par jour. Intéressé, Frank débuta peu après dans un film, probablement de Edward Sloman, The Last Hour, et rencontra Slim Talbot, qui devint par la suite sa doublure sur la plupart de ses films. Quelques années plus tard, il affirma que son premier souvenir de cinéma était un film avec Tom Mix, probablement Dick Turpin. Il enchaina ensuite les films, les apparitions et les cascades dans plusieurs films, tournés à la chaîne, dont La ruée sauvage, L'aigle noir ou Ben-Hur, A Tale of the Christ. Ces années furent éprouvantes physiquement et ses multiples chutes sans protections lui valurent des problèmes de santé toute sa vie.

Gary Cooper (à gauche) dans Tricks, 1925.

Décidé à ne pas rester dans l'ombre éternellement, et probablement par appât du gain, Frank prit les choses en main : il apprit à se maquiller correctement et se paya plusieurs photos de qualité. Pour 65 dollars, il investit même dans un petit film où il montrait ses prouesses sur un cheval. Grâce aux relations de son père, il rencontra une star de l'époque, Marilyn Mills, qui insista par pitié pour lui confier un rôle dans son prochain film, Tricks. Elle lui conseilla également de prendre un impressario, Nan Collins. Frank Cooper était, à l'époque, le patronyme de centaines de cascadeurs et même d'un assassin. Nan Collins conseilla donc à son nouveau protégé de changer de nom, et lui proposa le nom de sa ville natale dans l'Indiana, Gary. Sans réfléchir, il accepta ce changement et le fit légaliser quelques années plus tard.

> Les premiers rôles
Gary Cooper se présenta au réalisateur John Waters et au producteur Samuel Goldwyn. Dans un couloir, il rencontra même Henry King, à qui il montra sa petite bobine de présentation. Il est difficile de savoir grâce à qui, mais Cooper réussit à se faire engager sur le tournage de Barbara, fille du désert, et par un concours de circonstances, obtint un rôle à part entière. Goldwyn voulut lui offrir un contrat à 75 dollars par semaine, mais Cooper accepta celui de la Paramount, à 125 dollars par semaine. Le film lui valut ses premières critiques positives.

Il tourna dans Le démon de l'Arizona en 1927 sous la direction de John Waters, qui lui offrit sa première scène de baiser au cinéma avec Thelma Todd. Au cours d'une réception, il rencontra Clara Bow, qui était déjà une star du grand écran, et qui menait plusieurs relations amoureuses de front, dont une avec le réalisateur Victor Fleming. Elle insista pour que Cooper obtienne un petit rôle dans Le coup de foudre (It), puis qu'il partage la vedette dans Les enfants du divorce, sur lequel il entretint des relations houleuses avec le réalisateur Frank Llyod.

Gary Cooper dans Les Ailes (1927)

Paramount décida d'investir plusieurs millions dans une très grande épopée aérienne, mise en scène par William Wellman, Les Ailes. A nouveau, Clara Bow insista pour que sa nouvelle conquête obtienne un petit rôle dans le film. Il tourna une petite scène qui changea sa vie : on le voit arriver, serrer la main à ses amis et manger une tablette de chocolat puis, un peu après, son avion s'écrase. Ses amis retrouvent la tablette de chocolat entamée. Si ce petit moment l'imposa aux yeux des spectateurs, Cooper fut mécontent de sa scène, qu'il pensait avoir raté.

> Naissance d'une vedette
Gary Cooper fut engagé comme vedette sur Beau Sabreur, de John Waters. Ironie de l'Histoire, ce film était la suite de Beau Geste (1926), dont il tourna une nouvelle version ... quelques années plus tard. Il eut sur ce film une liaison avec Evelyn Brent, puis enchaina avec Les pilotes de la mort, avec Fay Wray (la vedette de King Kong). S'il ne s'est jamais rien passé d'autre entre eux que de l'amitié, la Paramount voulut faire croire à une relation amoureuse pour mieux promouvoir leur film suivant, Rien que l'amour, en 1928.

Colleen Moore choisit Gary Cooper comme partenaire pour Ciel de gloire (Lilac Time), dans une production First National. Le succès montant de Cooper ne leur permit pas de retravailler avec elle. Vedette, Cooper ne jouait pratiquement plus de westerns, mais beaucoup de films aériens. Pour Le Rêve immolé (The Shopworn Angel) avec Nancy Carroll, il parla pour la première fois à l'écran.

Avec Lupe Velez dans Le chant du loup (1929)

Cooper rencontra Lupe Velez en 1929 pour tourner Le chant du loup, de Victor Fleming, et ne la quitta plus, s'affichant avec elle en couverture de tous les journaux à scandale de l'époque, les journalistes les poursuivant partout, jusque dans leur villa cachée de Catalina. Il fut même question de mariage, mais il semblerait que la mère de Gary Cooper soit intervenu en sa défaveur.

Dans Mensonges, de Lewis Milestone, il eut pour partenaire le difficile acteur allemand Emil Jannings, puis revint au western avec The Virginian, son premier film entièrement parlant (les autres étaient plus sonorisés que parlés). Grosse production, dirigée par Victor Fleming, le film fut tourné en extérieurs, ce qui à l'époque n'allait pas de soi et engendrait un certain nombre de problèmes techniques. Il eut pour partenaire sur le film un jeune acteur, chargé de lui faire répéter l'accent de Virginie, Randolph Scott. Pour la promotion, la Paramount le compara à William S. Hart, la première grande star du western muet. Le film fut un triomphe et imposa Gary Cooper comme vedette.

Il enchaina les films dans les mois suivants : Seven Day's Leave, Only the Brave, The Texan et Les écumeurs, et enfin Cœurs brûlés, de Joseph von Sternberg. Sa relation avec Marlène Dietrich fut excellente, et probablement teintée d'amour, mais celle avec le réalisateur fut détestable : Cooper était persuadé - probablement à juste titre - qu'il ne voulait mettre en exergue qu'une vedette, Marlène, et qu'il méprisait le reste de la distribution, dont Adolphe Menjou (affirmations et rumeurs qui furent démenties par le réalisateur dans son autobiographie). Les critiques pour Cooper furent néanmoins très bonnes.

> A la conquête du monde
L'attaque de la caravane fut un film à très grands moyens : deux réalisateurs, deux équipes, neufs compositeurs, des décors en extérieurs et des kilomètres de pellicules (certaines rushes furent même utilisées pour d'autres films). Le soir, Cooper tournait un autre film, Les Carrefours de la ville, sous la direction de Rouben Mamoulian, dont Clara Bow refusa d'être la vedette féminine. Épuisé par le rythme des tournages et voulant probablement fuir Lupe Velez, Cooper s'envola pour l'Europe.

Avec la comtesse Dorothy Di Frasso

Un ami producteur lui demanda d'aller à la rencontre de son amie, la comtesse Dorothy Di Frasso, qui vivait à Rome dans une somptueuse demeure. Croqueuse d'hommes, elle prit en main son jeune invité et l'invita dans un tour d'Europe à la rencontre de la haute société, durant plusieurs semaines, mais la Paramount pria sa vedette de rentrer, pour lui faire tourner Sa femme, avec Claudette Colbert, puis I Take This Woman avec Carole Lombard. Les deux films furent des échecs cuisants.

Visiblement lassé du cinéma, Cooper s'envola à nouveau avec sa nouvelle amie en 1932, cette fois pour l'Afrique. Mais, ruiné et loin des plateaux, il revint rapidement à Hollywood pour sauver sa carrière. La Paramount ne l'avait pas rappelé et lui avait même trouvée un remplaçant, le jeune Cary Grant. C'est d'ailleurs avec lui qu'il tourna Le Démon du sous-marin.

Cooper n'était pas le premier sur la liste des comédiens susceptibles d'incarner Frederic Henry dans l'adaptation du roman de Ernest Hemingway, L'adieu aux armes, mais il fut assez convaincant pour récupérer un rôle destiné à Fredric March. Face à Helen Hayes, il interpréta le rôle le plus dialogué et le plus profond de sa première partie de carrière, et le film obtint plusieurs nominations aux Oscars (il en remporta deux). Fort de sa performance et de la nouvelle tournure que prenait sa carrière, Gary Cooper réclama pour son film suivant, Après nous le déluge, une augmentation conséquente de son salaire.

Veronica "Rocky" Balfe et Gary Cooper

Lors d'une réception, Gary Cooper rencontra Veronica Balfe, jeune actrice qui tentait sa chance sous le nom de Sandra Shaw et l'épousa le 15 décembre 1933 à New York, dans la plus stricte intimité.

samedi 14 mai 2011

jeudi 28 avril 2011

Journal de la mort de Gary Cooper (15-17 mai 1961) - Quotidien Ouest-France

Voici la première page du quotidien Ouest-France, du lundi 15 mai 1961, annonçant la mort de Gary Cooper.


Un article est également consacré à la disparition de l'acteur, à l'intérieur en page 3.


Deux jours plus tard, le mercredi 17 mai 1961, Ouest-France publia également un article sur les obsèques de la star, en première page.

vendredi 15 avril 2011

Gary Cooper et le Maccarthysme

L'acteur Robert Taylor devant la Commission des activités Anti-Américaines, 1947

Les républicains conservateurs remportèrent les élections du congrès en 1946, ouvrant ainsi une faste période anti-communiste aux Etats-Unis. L’ultra conservateur J. Parnell Thomas devint président de la Commission sur les activités anti-américaines (la HUAC), et entreprit de s'intéresser à Hollywood. L'année suivante, une liste fut crée, recensant tous les noms suspectés de communisme, où refusant de répondre aux questions de la Commission (Les Dix d'Hollywood, écartés des studios, dont le scénariste Dalton Trumbo et le réalisateur Edward Dmytryk). Le climat de chasse aux sorcières commença à diminuer à partir de 1954 et le discrédit du sénateur Joseph McCarthy.

"I can't actually give you a title to any of them ..."
Le 23 octobre 1947, Gary Cooper fut appelé à comparaître devant la Commission, en tant que "témoin amical", l'acteur n'ayant jamais été suspecté, au contraire, de sympathies communistes. Il fut interrogé par Robert E. Stripling (le chef investigateur), puis par H.A. Smith.

- Êtes vous membre de la Screen Actors Guild ?
- Oui, je suis membre depuis sa fondation.
- Depuis que vous êtes à Hollywood, avez vous remarqué une influence communiste à Hollywood ou dans l'industrie cinématographique ?
- Je crois en avoir remarqué une.
- A votre avis, quel est leur principal moyen de propagande à Hollywood ou dans l'industrie ?
- Eh bien, je crois qu'il se fait par le bouche à oreille.
- Voulez vous parler plus fort s'il vous plaît, Monsieur Cooper ?
- Je crois qu'il est fait par le bouche à oreille et par l'intermédiaire de pamphlets - et des écrivains, je suppose.
- Que voulez vous dire par bouche à oreille Monsieur Cooper ?
- Eh bien, je veux dire un genre de réunions.
- C'est votre observation ?
- C'est mon observation propre, oui.
- Pouvez vous nous dire quelques unes des déclarations que vous auriez pu entendre lors de ces rassemblements que vous pensiez communistes ?
- Eh bien, j'en ai entendu un certain nombre, je pense, au fil des ans. Eh bien j'ai entendu des choses comme "Ne pensez vous pas que la Constitution des Etats-Unis est dépassé depuis 150 ans ?" ou, je ne sais pas, j'ai entendu des gens dire "Peut-être que le gouvernement serait plus efficace sans congrès" - des déclarations que je trouvaient très anti-américaines.
- Avez vous déjà observé des informations communistes dans des scénarios ?
- Eh bien, j'ai déjà refusé quelques scénarios que je pensais teintés d'idées communistes.
- Pouvez vous citer un de ces scénarios ?
- Non, je ne pourrais pas m'en souvenir.
- Un instant. Monsieur Cooper, vous n'avez pas une mauvaise mémoire.
- Je vous demande pardon ?
- J'ai dit que vous n'aviez pas une mauvaise mémoire, non ? Vous devriez être capable de vous souvenir de quelques scénarios que vous avez refusé parce qu'ils étaient communistes.
- Eh bien, je ne pourrais pas vraiment vous en citer un, non.
- Allez vous y penser, et fournir une liste à la Commission ?
- Je ne pense pas que je pourrais, car je lis la plupart des scénarios la nuit, et si ils ne me plaisent pas, je ne les finis pas, ou si je les finis, je les renvoie au plus vite à leur auteur.

Gary Cooper évoqua ensuite un scénario, racontant le destin d'un homme voulant créer une armée américaine, dont les soldats refusaient de défendre leur pays. H.A. Smith lui montra enfin un document attestant qu'il aurait déclaré être un communiste, devant une foule de 90.000 personnes, à Philadelphie. Cooper confirma aux investigateurs que le document était faux, et déclara que le parti communiste n'avait jamais tenté de se servir de lui.

Gary Cooper, devant la Commission des activités Anti-Américaines

Honnêteté ou prudence ?
Que penser de l'attitude de Gary Cooper, qui ne lâcha aucun noms et refusa d'y réfléchir ? Dans son ouvrage Les sorcières de Hollywood, chasse aux rouges et listes noires, Thomas Wieder ne prend aucun parti pris, et se contente de citer les faits. Carl Foreman, scénariste blacklisté (scénariste du Train sifflera trois fois, de Fred Zinnemann) prit la défense de l'acteur, dans une interview donnée à Bertrand Tavernier en 1969 : "En fait Cooper s'est bien comporté. [...] Quand il est arrivé devant le Comité, il était innocent ... C'était un enfant et il a eu une conduite d'enfant. Il n'a donné aucun nom, mais n'a pas su quelle attitude prendre. [...] Il y a une grande différence entre Cooper et Wayne [John Wayne fut un ardent combattant de Carl Foreman, qu'il réussit à chasser de Hollywood, ndlr]. Pour ma part, j'ai toujours vu quelque chose de lincolnien chez Cooper."

Toutefois, Jean-Paul Török, dans son livre Pour en finir avec le Maccarthysme, lumières sur la liste noire à Hollywood, est beaucoup plus nuancé, voire carrément hostile à l'attitude de Gary Cooper. Il rappelle que l'acteur fut à la fin des années 30 un membre des "Hussards de Hollywood", une organisation paramilitaire qui se "proposait de nettoyer le cinéma des éléments indésirables, entendez les rouges de tout acabit, sans distinction de nuances". Török écrit qu'on a voulu mettre "les opinions réactionnaires [de Gary Cooper] sur le compte de la naïveté", et entend plutôt parler de prudence ; les agents de la star, habituée aux rôles de héros, lui auraient conseillés de ne pas se mouiller et de faire l'imbécile, pour ne pas écorner son image auprès du public.

Article rédigé à partir des ouvrages de Bertrand Tavernier, Jean-Paul Török et Thomas Wieder (voir la Bibliographie du blog).

mardi 12 avril 2011

Biographie de Gary Cooper - Prologue


Le phénomène Cooper
Quelques semaines après la mort de Gary Cooper, en 1961, le réalisateur Delmer Daves, qui l'avait dirigé dans La colline des potences (The Hanging Tree, 1959), écrivit : "c'était l'un des hommes les plus doux, les plus gentils que j'aie jamais connus, et sa sensibilité était celle d'un grand artiste, bien qu'il refusât ce terme, prétendant qu'il ne savait pas jouer et qu'il se contentait d'être lui-même". La part de mystère qui se dégage encore aujourd'hui quand on entreprend de comprendre ses choix de carrière, ses comportements contradictoires ou ses idées, trouve là, probablement, son origine. Comme si Gary Cooper avait traversé la première moitié du XXe siècle en agissant constamment au gré de ses envies, sans jamais se prendre pour ce qu'il était réellement : une star, un sex-symbol, un grand acteur.

Cette part de mystère, accentuée par un laconisme à l'écran comme à la ville, pousse parfois à catégoriser rapidement l'acteur. Comme un cowboy taciturne et solitaire tout d'abord (l'écrivain Charles Ford considérait que Cooper devait "figurer au Panthéon du Septième Art, et plus particulièrement dans la galerie réservée aux héros de l'Ouest"), alors que la plupart de ses films emblématiques - à l'exception du Train sifflera trois fois (High Noon, 1952) - sont à ranger parmi les comédies, les films d'aventures, de guerre ou les drames. Comme un républicain conservateur ensuite, à l'instar d'un John Wayne, alors qu'il refusa de donner des noms lors de la chasse aux sorcières et qu'il fut un ardent défenseur du scénariste blacklisté Carl Foreman. Comme un incorrigible coureur de jupons enfin, lui qui fut marié à la même femme de 1933 à sa mort. Pour autant, ces a priori étaient des facettes réelles de l'acteur.

"Le héros le plus respectable de Hollywood" selon Michel Ciment - qui refusa des rôles car ils ne correspondaient pas à l'image positive de ses personnages -, visage à l'écran des héros réels de l'Amérique tels que Alvin York, Lou Gehrig ou le Docteur Wassell, interprète de quelques unes des âmes les plus nobles du cinéma, comme John Doe, Longfellow Deeds ou Will Kane, pouvait être parfois le "personnage le moins respectueux", à l'écran (Vera Cruz, 1954) ou dans sa vie privée (on lui connait des nombreuses liaisons extraconjugales). Cooper incarnait l'Amérique plus que tout autre acteur, avec ses forces et ses faiblesses. Il était une représentation à lui seul du rêve américain. Carl Foreman voyait en lui "quelque chose de lincolnien" et déclara en 1969 : "Le phénomène Cooper explique une partie de l'Amérique" ...

... le destin d'un jeune homme du Montana devenu l'une des plus grandes stars de son époque, une légende du cinéma de l'âge d'or hollywoodien.