vendredi 25 mars 2011

Le rebelle (1949)


>> ÉQUIPE TECHNIQUE / CARACTÉRISTIQUES
Titre original : The Fountainhead, Réalisateur : King Vidor, Scénario : Ayn Rand, Producteur : Henry Blanke, Musique : Max Steiner, Photographie : Robert Burks, Direction artistique : Edward Carrere, Montage : David Weisbart, Genre : Drame, Durée : 114 minutes, Noir et Blanc, Sortie US : 2 juillet 1949.

>> DISTRIBUTION
Gary Cooper (Howard Roark), Patricia Neal (Dominique Francon), Raymond Massey (Gail Wynand), Kent Smith (Peter Keating), Robert Douglas (Ellsworth M. Toohey), Henry Hull (Henry Cameron).

>> HISTOIRE
Howard Roark, architecte visionnaire et individualiste, parvient à se faire embaucher dans un cabinet, mais quelques années plus tard, et seulement quatre projets réalisés, l'argent manque. Parce qu'on veut le dénaturer, il n'accepte pas d'être le créateur d'un énorme projet qui aurait pu le remettre à flots, et préfère changer de métier. Devenu ouvrier dans une carrière, il rencontre la fille de son employeur, la belle Dominique Francon, critique dans un célèbre journal. Ils tombent respectivement sous le charme de l'autre, sans oser se l'avouer. Quelques jours plus tard, Roark est rappelé à New-York pour construire un important building.
Dénouement. Mais sa vision moderne de l'architecture déplaît à beaucoup, et rares sont ceux à croire en lui. Dominique Francon est de ceux là mais, se refusant d'aimer Roark, elle épouse le directeur de son journal, le puissant Gail Wynand. L'architecte visionnaire enchaine les projets et acquiert une notoriété telle que Wynand lui demande de dessiner les plans de sa future maison, tout en devenant un de ses plus grands défenseurs. Peter Keating est, quant à lui, un architecte médiocre mais dans l'air du temps. Incapable d'imaginer la nouvelle cité Cortlandt, il demande à son ancien ami Roark de la dessiner, qui accepte à condition que rien de son projet ne soit dénaturé. Devant l'incapacité de Keating de tenir cette condition, Roark fait exploser en pleine nuit les premiers immeubles construits. Arrêté, il est lynché dans la presse (à l'exception du journal de Wynand) et s'attire la haine de l'opinion public. Toutefois, après un long monologue sur les valeurs individualistes de son pays, il est acquitté à son procès. Wynand, qui a tout perdu en le défendant, lui confie un dernier projet (l'immeuble le plus haut jamais construit) et se suicide. Enfin "libres", Roark et Dominique se marient.

>> AFFICHES


>> NOMINATIONS ET RÉCOMPENSES
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>> AUTOUR DU FILM
- Ayn Rand a adapté son propre roman, The Fountainhead, datant de 1943.
- Le personnage de Gary Cooper est inspiré de l'architecte Frank Lloyd Wright (qui construisit aussi une maison alors qu'il vivait une relation avec la femme de son client).

- Le réalisateur Delmer Daves raconte une anecdote intervenue lors de la préparation du film : il déjeunait avec Gary Cooper, non loin de King Vidor et le producteur Henry Blanke, absorbés dans une conversation sur Le Rebelle. Cooper, l'oeil amusé, s'écria "Dites, les gars, vous ne seriez pas en train de parler de moi par hasard ?" Ils acquiescèrent, et dirent qu'ils étaient en train de discuter de son personnage. Cooper rétorqua alors : "Eh bien, j'ai le regret de vous décevoir, les gars, mais j'ai entendu des douzaines de types comme vous discuter de mon personnage. Tout ce qu'ils ont obtenu, c'est Coop." Et Delmer Daves d'ajouter quelques années plus tard, à propos de cette anecdote : "Il y avait une grande intégrité dans le simple fait d'être Coop'. Ni lui, ni Clark Gable ne faisaient partie de ces acteurs complexés, névrosés qui ont été formés par la Méthode [...]. C'était des gens ouverts, qui donnaient beaucoup d'eux mêmes, et nous leurs étions reconnaissants de ce qu'ils nous donnaient." (B. Tavernier, Amis américains, Arles, Institut Lumière/Actes Sud, 2008, p. 292)

- Le film cumula 1 091 692 entrées en France, dont 197 518 à Paris.

>> RÉPLIQUES
- "Pourquoi tiendrais-je compte de votre opinion ?
- Parce que je suis le critique de "The Banner".
- Vous me confondez avec vos lecteurs !"
(Raymond Massey/Robert Douglas)

- "Vous finirez dans une carrière.
- J'en suis sorti.
- Ce building n'est pas votre début, c'est votre sentence de mort. Avez vous eu un autre client ?
- Non.
- Ils vous haïssent à cause de la grandeur de votre oeuvre, parce qu'ils ne peuvent ni vous corrompre, ni vous dominer. Ils vous empêcheront de vivre, ils vous abattront. Je n'y assisterai pas".
(Patricia Neal/Gary Cooper)

- "J'ai réfléchi sur le problème des habitations à bon marché. J'ai songé aux inventions, aux matériaux jamais utilisés intelligemment. J'aimerais résoudre ce problème.
- Oui, je comprends.
- Peter, avant d'aider les autres, tu dois être capable de réalisation. Pour cela tu dois aimer ta tâche, et non les hommes, ton travail, non l'objet de ta charité. Tant mieux si des êtres vivent mieux dans ma maison, mais ce n'est pas ce qui inspire mon travail. Ma récompense, mon but, ma vie, c'est le travail en soi. Mon travail comme je l'entends."
(Gary Cooper/Kent Smith)

- "Jadis, un homme découvrit le feu. Il fut probablement brûlé, mais ce don qu'il fit à ses frères sauva la Terre de l'obscurité. Des hommes tracèrent des nouvelles routes forts de leur seul idéal. Les penseurs, les artistes, les scientifiques livrèrent un combat solitaire. Les concepts nouveaux furent combattus et dénoncés, mais le visionnaire allait de l'avant. Il souffrit, paya, mais vainquit. Il ne cherchait pas à plaire à ses frères qui haïssaient ce qu'il leur offrait. Sa vérité fut son guide, son œuvre fut son unique but. Son œuvre, non celle de ceux qui l'exploitèrent. Sa création, non le profit. L'expression de sa vérité. Sa vérité lui était plus chère que toute chose, que tout homme. Il avançait en dépit de ses contemporains, son intégrité fut son étendard. Il ne servit à rien, ni personne. Il vécut par lui-même et créa des œuvres qui sont la gloire de l'humanité. Ainsi en est-il de toute œuvre. L'esprit seul survit à l'homme, son intelligence est sa seule arme. L'esprit est individuel, il n'existe pas de cerveau collectif, l'homme doit penser et agir par lui-même. La raison ne fonctionne sous aucune forme de contrainte, elle ne peut se subordonner aux besoins et désirs des autres, elle n'est pas un objet de sacrifice. Le créateur s'en tient à son propre jugement, le parasite épouse l'opinion d'autrui. Le créateur pense, le parasite copie. Le créateur produit, le parasite pille. Le créateur cherche à conquérir la nature, le parasite veut dominer les hommes. Le créateur est indépendant, ni esclave ni maître, il traite avec les hommes par choix ; le parasite aspire au pouvoir, il asservit les hommes. L'homme, dit-il, n'est qu'un instrument qui pense ce que les autres pensent, assujetti aux besoins communs, non aux siens propres. Voyez l'histoire, elle prouve que tout chef d'œuvre naît d'un esprit indépendant. Toutes les destructions surgissent quand on groupe les hommes en troupeau sans droits, sans buts personnels, sans volonté ni dignité. C'est un conflit ancien, on le désigne autrement : l'individuel contre le collectif. Notre pays a pris pour base les principes de l'individualisme, les droits inaliénables de l'homme. Chacun pouvait chercher son propre bonheur, gagner et produire, et non renoncer ! Prospérer, et non mourir de faim. Réaliser, et non piller. Faire de sa valeur personnelle une priorité, et se respecter lui-même. Regardez le résultat : l'esprit collectif vous demande de détruire tout cela, tout comme on détruit notre planète. Je suis architecte, je sais qu'un projet dépend de ses fondations. Je ne veux pas vivre dans le monde que nous construisons. Mes idées m'appartiennent, elles m'ont été volées par rupture de contrat, je n'ai pas eu le choix. Certains ont cru pouvoir adapter mon travail à leurs désirs, ils ont décrété, sans mon consentement que je devais les servir sans compensation. J'ai donc dynamité Cortlandt. Je l'avais construit, concrétisé. Je l'ai détruit. J'avais accepté de le construire, mais à mon idée. C'était cela le prix, pas de l'argent. Les caprices des autres ont défiguré mon oeuvre, sans rien en retour. Je suis ici pour dire que personne n'a de droit sur moi, ni sur ma volonté, ni sur mon travail. Personne ! Il fallait que ça soit dit. Le monde souffre d'un excès d'abnégation. Je suis venu me faire entendre au nom de tous ceux qui veulent rester indépendants. Voilà ce que je pense : je ne veux dépendre de personne, un homme a le droit d'exister pour lui-même."
(Gary Cooper)

>> CRITIQUES
" [Une] apologie de l'individualisme créateur. On retrouve [...] ce goût pour les personnages qui vont jusqu'au bout de leur destin, de leurs partis pris, mais dans The Fountainhead cet acharnement est ressenti de l'intérieur avec un véritable élan lyrique, si personnel qu'on reste stupéfait que Vidor ignore totalement ce film dans son livre. [...] Clive Denton se trompe lorsqu'il croit voir dans l'adaptation et dans la mise en scène de The Fountainhead un sabotage délibéré des thèmes de l'écrivain". (B. Tavernier et J.-P. Coursodon, 50 ans de cinéma américain, Paris, Omnibus, 1995, p. 956)

" Là encore, il est bien difficile de séparer l'acteur du personnage, au charisme si fascinant, et de les détacher du contexte. Fountainhead est un film d'artifices, avec des éclairages para-expressionnistes, entièrement justifiés dans cette biographie d'architecte, une musique de Max Steiner permanente et tonitruante, des comportements démentiels et des coups de théâtre abrupts : en dix secondes de film, des fiançailles se rompent, un homme apparemment calme se suicide, une femme décide de se marier, le tout culminant avec l'interminable ascension finale d'un monte charge de la femme amoureuse vers le centième étage et Cooper, en contre plongée, jambes écartées, en silhouette devant le ciel ... [...] Il s'agit peut-être là du film le plus fou de l'histoire du cinéma". (L. Moullet, Politique des acteurs, Paris, Éditions de l'Étoile, 1993, p. 38)

"Cette adaptation du roman de Ayn Rand est sans doute le film le plus significatif et le plus personnel de Vidor, à défaut d'être le plus convaincant. [...] Paradoxe, ce poème à la gloire de l'individualisme se soucie peu de décrire des individus ; cette évocation d'un érotisme bigger than life reliant les deux héros a fort peu d'intensité charnelle". (J. Lourcelles, Dictionnaire du cinéma, les films, Paris, Robert Laffont, 1992, p. 1240)

"[...] Le fait enfin que Gary Cooper et Patricia Neal aient été passionnément amoureux l'un de l'autre, à l'époque du tournage du Rebelle,  a certainement contribué à apporter une dimension supplémentaire au film. La fabuleuse beauté de la dernière scène [...] en témoigne". (P. Brion, Regards sur le cinéma américain (1932-1963), Paris, Éditions de la Martinière, 2001, p. 439) 

>> PHOTOS DU FILM


>> DOCUMENTS

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